Un hiver dans le sud, mais avec des détours ! Cette fois, nous n’optons pas pour un itinéraire menant directement en Algarve mais traversons l'Espagne via Gênes et Barcelone. Nous visitons des monastères, grimpons sur des rochers, découvrons des spécialités culinaires et nous laissons enchanter par l’immensité des paysages espagnols. Un road trip riche en aventures et découvertes !
L’Espagne offre une diversité impressionnante en hiver. Dans les Pyrénées et la Sierra Nevada, les sommets enneigés et des pistes bien préparées attirent les skieurs et les snowboardeurs alors que sur la côte méditerranéenne, notamment en Andalousie, règne un climat tempéré idéal pour des tours de villes et des randonnées. Il peut geler dans le centre de l'Espagne, notamment à Madrid et à Tolède, avec un froid sec sous un ciel souvent clair. Dans le nord, en revanche, les pluies sont fréquentes, la mer agitée et les vents forts en raison des dépressions atlantiques. Qu'il s'agisse de vacances actives ou purement touristiques, l'Espagne est aussi en hiver un pays aux multiples possibilités.
Elle ne séduit pas seulement par ses paysages mais également par la grande diversité de ses spécialités culinaires. On peut se réchauffer dans les Pyrénées et la Sierra Nevada avec de savoureux ragoûts comme la olla aranesa ou le puchero andalou. La Castille nous fait découvrir des plats consistants comme le cochinillo asado (cochon de lait rôti) de Ségovie ou le ragoût de judión de la Granja (haricots blancs géants). Madrid est connue pour son copieux cocido madrilène, une sorte de pot-au-feu avec de la viande, des pois chiches et des légumes. La côte méditerranéenne séduit avec ses poissons et fruits de mer frais tandis que la Galice propose des plats comme le poulpe à la galicienne (poulpe au paprika et pommes de terre) et le caldo Gallego (soupe aux choux). Dans le pays Basque, on peut apprécier les pintxos – des amuse-bouches préparés avec art – dans les tavernes.
Belote et rebelote ! Nous suivons pour la quatrième fois les oiseaux migrateurs et passons l'hiver dans le sud ensoleillé. Pas en Grèce, comme prévu initialement, mais pour la première fois au Portugal. En ce qui concerne le temps et les précipitations, la péninsule ibérique est mieux classée en hiver dans les statistiques météorologiques que la Grèce. Le temps y est plus sec et comme nous ne savons pas si notre camping-car est réellement étanche après le choc subi lors des pluies en Sardaigne et les réparations, nous trouvons ce changement de destination judicieux, d'autant plus qu'il y a au Portugal davantage d'ateliers et d'infrastructures à disposition en cas de problème.
L'hiver est encore long et la distance qui nous sépare de l'Algarve également. Quelque 2500 kilomètres dans le meilleur des cas. Mais les trajets courts ne sont pas notre truc, c’est bien connu. Ceux qui lisent les articles de notre blog de voyage savent que le trajet est pour nous un but en soi. C’est ainsi que nous faisons en sorte de disposer cette fois encore de suffisamment de temps et de flexibilité pour nous rendre dans le sud. Nous choisissons d’abord la voie maritime – du moins entre Gênes et Barcelone.
En ferry jusqu'à Barcelone
Juste après Noël, nous préparons notre camping-car et traversons les Alpes en direction du Tessin. Pour être rapidement en mode cappuccino, nous passons deux nuits à Locarno sur un emplacement situé dans le delta de la Maggia. Le temps est agréable, le ciel bleu et la Piazza Grande pleine de monde. Avant de traverser la vallée du Pô, nous passons par les derniers contreforts des Alpes pour grimper le long d’une via ferrata au-dessus de Baveno. La vue sur la baie de Verbania est superbe et s'étend de la vallée du Pô aux sommets enneigés des Alpes qui culminent à quatre mille mètres. Nous décidons de passer la nuit sur le parking de la via ferrata et de ne reprendre la route que le lendemain. Nous fêtons le Nouvel An dans le Piémont à Acqui Terme. La raclette est tout simplement meilleure à bord du camping-car qu'à la maison – et surtout le soir du réveillon. Le premier jour de la nouvelle année, nous arrivons en passant par les Apennins sur la côte ligure. Là, nous pédalons autour du Mont Mao sur un agréable sentier à Finale Ligure et Spotorno – la Mecque du VTT. Le 4 janvier, nous embarquons à Gênes sur le ferry à destination de Barcelone. Au lieu de parcourir 900 kilomètres sur de pénibles tronçons d'autoroute, avec de nombreux chantiers de construction et encore plus de péages, nous choisissons la route maritime plus relaxante et financièrement plus avantageuse que la voie terrestre, si l’on calcule correctement : 410 euros pour deux personnes, le camping-car et une cabine. Nous arrivons reposés au pays des toréadors et du flamenco vingt heures plus tard. Comme nous avons vécu en tout plus d’une année en Espagne, nous savons que ce pays a beaucoup plus à offrir que ces clichés. C’est pourquoi nous décidons, cette fois encore, de ne pas emprunter l’habituelle route le long de la Costa Brava allant vers le sud mais de traverser le pays en direction de Madrid et du Portugal.
L’abbaye de Montserrat
Notre première destination est l’abbaye de Montserrat, située à environ une heure de voiture à l'ouest de Barcelone, dans le parc naturel du même nom. Le monastère, perché sur des rochers, date de la fin du Moyen Âge mais son origine remonte, avec plusieurs ermitages, à beaucoup plus loin. L’abbaye est également connue pour sa Vierge noire et son choeur de garçons. On peut visiter ce lieu touristique fort apprécié et très fréquenté en partant du fond de la vallée avec un train à crémaillère ou un téléphérique – ou en s’y rendant en camping-car. On peut aussi passer la nuit sur place en payant 20 euros de frais de stationnement. Cela vaut la peine, car le parc naturel caractérisé par d’impressionnantes formations rocheuses invite à la randonnée.
Divinement bons et diablement chers
Nous poursuivons notre route vers l'ouest en direction de Lleida où nous aimerions participer à une « Calcotada ». Les « calcots » sont des oignons de printemps très appréciés en Catalogne à cette époque de l'année. On les mange avec une sauce spéciale après les avoir fait griller sur du bois de hêtre ou des sarments de vigne. Nous réservons une table à « La Dolceta » et sommes déçus d’apprendre que cette spécialité ne sera servie que le lendemain. Pour la remplacer, le serveur nous apporte des tapas et un filet de bœuf grillé bien juteux. C’est excellent. Nous sommes seulement surpris par le montant de l’addition. Les petits pois coûtent 33 euros, soit 11 euros de plus que le filet de bœuf tendre comme du beurre. Une erreur ? « Non », nous répond le caissier. « Una especialidad. » Nous devons avouer que nous ne connaissions jusqu’à présent que les petits pois des conserves Hero et que ces trucs espagnols avaient un goût divin. Mais 33 euros ? De retour au camping-car, nous trouvons l’explication sur Google : le pois larme fait partie des légumes les plus chers du monde. Une période de récolte très courte – deux semaines – et le fait qu'ils doivent être servis dans les 24 heures (ils perdent sinon 60 pour cent de leur goût et de leur contenu), associé à un processus de préparation complexe (60 grammes de rendement par kilo), font de « l'or vert », comme on appelle ces pois, une spécialité non seulement incroyablement savoureuse mais aussi incroyablement chère. Nous avons au moins appris quelque chose et fait une expérience de plus durant ce voyage.
Un voyage dans le passé
Après ce sommet culinaire, nous nous rendons sur un parking municipal gratuit au bord du Sègre. Il y a de tels emplacements dans de nombreuses communes espagnoles, le plus souvent avec des dispositifs d'approvisionnement et d'évacuation et parfois l'électricité (payante). En « contrepartie », nous effectuons généralement nos achats dans le magasin du village ou commandons après la promenade à vélo ou la randonnée quelques tapas. Nous allons ensuite au bord de l’Èbre et passons une nuit tranquille directement sur le rivage avant de partir le lendemain en direction de Belchite. Ce lieu abandonné était dans le temps une ville florissante au cœur de l'Aragon. Pendant la guerre civile entre les nationalistes du dictateur Franco et les républicains, le village a été en 1937 le théâtre d'un des plus grands massacres de l'histoire espagnole. Plus de 5000 habitants ont été tués lors d’une bataille acharnée. D'innombrables exécutions ont eu lieu sur la Plaza Major qui était auparavant le centre d'une vie sociale paisible. L’odeur des nombreux cadavres dans les rues et les ruelles était insupportable dans la chaleur de la fin de l’été. Les morts ont été provisoirement déposés dans des cuves de stockage d’huile d’olive avant d’être brûlés. Franco a interdit la reconstruction du village. Belchite devait rappeler ces terribles événements. Une nouvelle ville a été construite un peu plus au nord. Les ruines peuvent aujourd’hui être visitées avec un guide – ou un audioguide.
L'Espagne – superbement déserte
Nous nous rendons dans la pampa durant les jours suivants : pas de village, pas de maison, pas d’arbre. Rien. Juste une route de gravier brun rougeâtre qui disparaît à l'horizon et quelques vautours fauves qui tournent au-dessus des collines rocheuses. Le paysage est d'une beauté fascinante. Nous décidons de passer la nuit de pleine lune ici, dans le calme et la solitude. Alors que nous n’avons pas vu le moindre véhicule de toute la journée, une voiture avec quatre types à bord qui nous dépasse au crépuscule nous intrigue. Elle ralentit et s’arrête un peu plus loin avant de repartir. C’est la fin de notre nuit romantique dans le désert et notre intuition, importante lors du choix d’emplacements en pleine nature, a disparu. Nous décidons de retourner au parking gratuit de Belchite et de reporter au lendemain la découverte d’une deuxième partie du désert, avec Valmadrid.
Plus d'informations de voyage sont publié dans le magazine Autocaravane,numéro 2/2025
Texte et Photos : Marco Schnell
de magazine : Autocaravane, numéro 2/2025